Analyse de Jurisprudence Bancassurance
Titre original : La banque n’est pas responsable de l’encaissement d’un chèque par un mandataire judiciaire sur son compte personnel au lieu de son compte professionnel
Mots clés
Crédit immobilier – Prêt in fine – Perte de chance – Préjudice – Prescription
L’essentiel
La perte de chance d’éviter la réalisation du risque que, du fait d’une contre-performance de contrats d’assurance, leur rachat ne permette pas de rembourser le prêt in fine, n’est réalisée qu’au terme du prêt, date de réalisation du dommage et date à laquelle sa révélation à la victime est également certaine, faisant courir le délai de prescription de l’action.
Auteur
Bénédicte Bury, avocate associée au Barreau de Paris, Avocap 2.2, ancien membre du Conseil national des barreaux
Analyse
L’analyse complète de cette jurisprudence est parue dans la Gazette du Droit bancaire n°21 du 11 juin 2019 : Prêt in fine, perte de chance, préjudice éventuel et prescription
Décisions (texte intégral)
- Cass. 1re civ., 16 janv. 2019, no 17-21222, ECLI:FR:CCASS:2019:C100037, Sté Primonial partenaires c/ M. et Mme X, D (rejet pourvoi c/ CA Paris, 9 mai 2017), Mme Batut, prés. ; SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Marc Lévis, SCP Rousseau et Tapie, SCP Thouin-Palat et Boucard, av.
- Cass. com., 13 févr. 2019, no 17-14785, ECLI:FR:CCASS:2019:CO00199, Banque CIC Nord Ouest c/ Mme B., PB (cassation partielle CA Caen, 15 déc. 2016), Mme Mouillard, prés. ; Me Bouthors, Me Le Prado, av.
- Cass. com., 6 mars 2019, no 17-22668, ECLI:FR:CCASS:2019:CO00241, SCI Eloes et M. V. c/ Société Générale, D (cassation partielle CA Aix-en-Provence, 11 mai 2017), Mme Mouillard, prés ; SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, av.
1. Cass. 1re civ., 16 janv. 2019, no 17-21222
ECLI:FR:CCASS:2019:C100037, Sté Primonial partenaires c/ M. et Mme X, D (rejet pourvoi c/ CA Paris, 9 mai 2017), Mme Batut, prés. ; SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Marc Lévis, SCP Rousseau et Tapie, SCP Thouin-Palat et Boucard, av.
Références
Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mercredi 16 janvier 2019
N° de pourvoi: 17-21218
Non publié au bulletin Rejet
Mme Batut (président), président
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Marc Lévis, SCP Rousseau et Tapie, SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat(s)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Donne acte à la société Primonial partenaires du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre la Société d’exploitation MAB ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 9 mai 2017, RG n° 16/06534), que M. X… a souscrit, à effet du 2 janvier 2002, auprès de la société d’assurance La Fédération continentale, devenue Generali, un contrat d’assurance sur la vie en unités de compte commercialisé par la société JP Morgan Fleming asset management, aux droits de laquelle vient la société Primonial partenaires (le courtier grossiste), sur lequel a été versée une certaine somme ; que, pour financer cette opération, M. et Mme X… ont, le 10 janvier 2002, conclu auprès de la SBE, devenue Société d’exploitation MAB (la banque), un prêt in fine d’une durée de cent vingt mois de même montant, en garantie duquel M. X… a délégué à la banque les droits de créance dont il disposait au titre de son contrat d’assurance sur la vie ; que les revenus de ce contrat n’ayant pas permis de couvrir le coût du prêt, M. et Mme X… ont, par acte du 26 juin 2012, assigné en indemnisation la banque et le courtier grossiste, lequel a appelé en intervention forcée et en garantie la société Sax patrimoine consultant, aux droits de laquelle vient la société Magnacarta ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le courtier grossiste fait grief à l’arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription, alors, selon le moyen, que le dommage résultant d’un manquement à l’obligation d’information ou de conseil consistant en la perte de la chance de ne pas contracter ou d’éviter le risque qui s’est réalisé se manifeste dès la conclusion du contrat ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a relevé que les contrats avaient été conclus les 2 et 10 janvier 2002 ; qu’en considérant néanmoins que l’action intentée le 26 juin 2012, soit plus de dix ans après la conclusion des contrats n’était pas prescrite, la cour d’appel a violé l’article L. 110-4 du code de commerce ;
Mais attendu que la prescription d’une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu’elle n’en a pas eu précédemment connaissance ; qu’ayant estimé que le préjudice résultant des gains manqués et des pertes subies correspondant aux intérêts et frais de l’emprunt payés en vain n’avait été révélé à M. et Mme X… de façon certaine qu’à la date de remboursement du prêt in fine, dont la dernière échéance était fixée au 18 janvier 2012, dans la mesure où, pendant toute la période antérieure, le contrat d’assurance sur la vie pouvait connaître une évolution favorable et, finalement, permettre le dénouement de l’opération sans perte pour les souscripteurs, la cour d’appel en a exactement déduit que l’action, soumise à la prescription quinquennale de l’article L. 110-4 du code de commerce depuis l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, n’était pas prescrite lors de la délivrance de l’assignation ; que le moyen n’est pas fondé ;
Sur les deuxième et troisième moyens, ci-après annexés :
Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Primonial partenaires aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. et Mme X… la somme globale de 1 000 euros et la même somme à la société Magnacarta ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize janvier deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Primonial partenaires.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt d’AVOIR rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription ;
AUX MOTIFS QUE « en application de l’article L 110-4 du code de commerce, en sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, »Les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par dix ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes » ;
Considérant qu’il résulte de ce texte que cette prescription s’applique aux rapports entre un commerçant et un particulier et que l’existence d’« obligations nées à l’occasion de leur commerce » ne s’apprécie qu’au regard de l’activité du commerçant et non pas du particulier ;
Considérant qu’en application de l’article L 110-1 du code de commerce, toutes les opérations de banque et de courtage sont des actes de commerce, ce d’autant qu’en l’espèce l’octroi de prêts pour la société SEMAB ou la souscription de contrats d’assurance vie pour la société PRIMONIAL PARTENAIRES correspondent à des opérations habituelles de ces deux sociétés dans le cadre de leur activité commerciale, qu’il s’en évince que les dispositions de l’article L 110-4 du code de commerce sont applicables au présent litige ;
Considérant que la prescription d’une action en responsabilité, contractuelle ou délictuelle, court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu’elle n’en avait pas eu précédemment connaissance ;
Considérant que le préjudice résultant des gains manqués et des pertes subies correspondant aux intérêts et frais de l’emprunt payés en vain ne pouvait être révélé aux appelants et présenter un caractère certain permettant de rechercher la responsabilité des intimées qu’à la date de remboursement du prêt in fine dans la mesure où pendant toute la période antérieure le contrat d’assurance vie pouvait connaître une évolution favorable et finalement permettre le dénouement du montage à tout le moins sans perte pour les souscripteurs ;
Considérant qu’alors que la dernière échéance du prêt était fixée au 18 janvier 2012, l’action intentée par Monsieur et Madame X…, soumise à prescription quinquennale de l’article L 110-4 du code de commerce depuis l’entrée en vigueur de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008, n’était pas prescrite lors de la délivrance de l’assignation du 26 juin 2012, que le jugement dont appel doit être en conséquence infirmé et la fin de non-recevoir tirée de la prescription rejetée » ;
ALORS QUE le dommage résultant d’un manquement à l’obligation d’information ou de conseil consistant en la perte de la chance de ne pas contracter ou d’éviter le risque qui s’est réalisé se manifeste dès la conclusion du contrat ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a relevé que les contrats avaient été conclus les 2 et 10 janvier 2002 ; qu’en considérant néanmoins que l’action intentée le 26 juin 2012, soit plus de 10 ans après la conclusion des contrats n’était pas prescrite, la cour d’appel a violé l’article L. 110-4 du code de commerce.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt d’AVOIR condamné la société exposante à payer à M. et Mme X… la somme de 3000 € au titre de leur préjudice moral et ordonné la capitalisation des intérêts ;
AUX MOTIFS QUE : « les époux X…, qui exposent être des clients totalement profanes en matières de produits financiers et de montage à effet de levier et ne présentent leurs demandes qu’à l’encontre de la société PRIMONIAL, soutiennent que le courtier a manqué à ses obligations d’information et de conseil renforcé, qu’ils précisent que la plaquette de présentation du « PEPS » éditée par la société PRIMONIAL PARTENAIRES ne fait état que d’exemples positifs qui auraient dû leur permettre non seulement de générer une plus-value mais encore de rembourser le prêt in fine, qu’ils n’ont nullement été informés des risques réels relatifs au montage auquel il Leur a été conseillé de souscrire, que cette information était d’autant plus importante que les contrats ont été souscrits juste après les événements du 11 septembre 2001 qui ont provoqué l’effondrement des cours boursiers et que plutôt que de présenter l’opération en indiquant l’ensemble de ses coûts de ses risques et de ses conséquences financières si les rendements invoqués dans les documents publicitaires n’étaient pas atteints, le courtier ne l’a présentée que de manière très avantageuse, qu’ils en concluent qu’il a manqué à ses obligations et a engagé sa responsabilité à leur encontre ;
Considérant que la société PRIMONIAL soutient qu’elle a respecté ses obligation et que les obligations d’information et conseil sur lesquelles les époux X… recherchent sa responsabilité incombaient au courtier direct de ces derniers, la société SAX PATRIMOINE CONSULTANT, qu’elle ajoute que le placement« Stratégie PEP », qui n’est qu’un contrat d’assurance vie en unités de compte adossé à un contrat de prêt in fine, n’est pas un investissement spéculatif mais une opération simple dont le mécanisme est connu de tous, que la plaquette commerciale remise était descriptive et nullement trompeuse, qu’elle ne cherchait pas à occulter le placement en bourse et que la garantie PEP ne concernait que le capital net investi, qu’au jour de la souscription du contrat la prévision du tableau figurant sur la plaquette n’était pas particulièrement optimiste et s’appuyait sur des données concrètes et vérifiables, précisant que les effondrements successifs qui ont secoué les marchés boursiers ces dernières années n’étaient nullement prévisibles que ce soit dans leur ampleur ou dans leur existence, que s’agissant du rendement de 9%, il est bien précisé dans la plaquette qu’il s’agit d’une hypothèse, qu’il apparaît que Monsieur et Madame X… ont reçu les documents nécessaires à une information complète et loyale du produit souscrit alors que la plaquette d’information décrivait précisément le placement et mentionnait que les sommes étaient investies en bourse, que la mention du risque de fluctuation des valeurs en unités de compte à la hausse comme à la baisse figurait dans les différents documents de l’assureur dont ils ont été destinataires et le coût de l’emprunt était mentionné dans les différents documents qui leur étaient adressés ; Considérant qu’il résulte des pièces produites et notamment du protocole Courtier d’assurance signé entre la société JP MORGAN FLEMING SELECTION, aux droits de laquelle vient la société PRIMONIAL, et la société SAX PATRIMOINE CONSULTANT, aux droits de laquelle vient la société MAGNACARTA le 6 novembre 2001 et des explications des parties que la société PRIMONIAL est intervenue en qualité de courtier grossiste et qu’elle a commercialisé un produit financier dénommé PEPS ou Stratégie PEP qui était la combinaison de deux opérations : d’une part la souscription auprès de la Fédération Continentale, devenue GENERALI VIE, d’un contrat d’assurance vie dénommé Stratégie Fleming Monde pour une durée de dix ans et d’autre part, l’avance du montant de l’investissement par la souscription d’un emprunt in fine auprès de la SBE pour la même durée, qu’elle est ainsi le concepteur du montage à effet de levier et de la plaquette commerciale adressée à la société SAX PATRIMOINE CONSULTANT laquelle proposait la souscription de ce produit à ses clients en application du protocole du 6 novembre 2001 aux termes duquel elle devait « s’assurer que le client est bien en possession de toutes les informations et de tous les documents prescrits par JPMFS, préalablement à la signature du document de souscription » ; qu’en qualité de concepteur du produit, la société PRIMONIAL est tenue envers les souscripteurs d’une obligation d’information complète et loyale permettant aux clients d’avoir une vision exacte des risques encourus et qu’elle est responsable du contenu des documents commerciaux d’information qu’elle a transmis à la société SAX PATRIMOINE CONSULTANT et qui ont été remis aux clients ;
Considérant que Monsieur et Madame X… produisent aux débats la plaquette de présentation du produit « PEPS » aux termes duquel il est notamment précisé « L’idée neuve … PEPS vous avance vos dix prochaines années d’épargne », « Au lieu d’une épargne traditionnelle constituée régulièrement, PEPS vous permet de disposer immédiatement d’un capital à investir en bourse, dans la limite de 600 000 francs. Or les chiffres le démontrent… Bien que soumise à certaines fluctuations, la Bourse offre le meilleur rendement pour un investissement à long terme. Avec PEPS, votre épargne bénéficie donc d’un important effet de levier » « PEPS, la combinaison astucieuse d’un contrat d’assurance vie option PEP souscrit auprès de la Fédération Continentale (groupe GENERALI) et d’une avance consentie par un établissement de crédit » ; Considérant que sur la deuxième page de cette plaquette figure notamment un comparatif entre un contrat d’épargne traditionnel et un contrat PEPS aux termes duquel il apparaît que pour une épargne traditionnelle de 1000 francs (152,45 euros) par mois, le capital obtenu, au bout de 10 ans est de 192 000 francs (29 270,21 euros)
alors que la plus-value obtenue pour le placement d’un capital sur un contrat PEPS est de 290 000 francs (44210, 21 euros), que sous ce comparatif, il est précisé : « cette comparaison est effectuée sur la base d’une avance de 200 000 FRF au taux de 6 % par an et pour un rendement annuel moyen de 9 %. Aucun rendement enregistré sur 10 ans de Bourse, après une baisse d’au moins 20% sur 6 mois consécutifs, n’a été inférieure à 9 %. Etude réalisée sur 30 ans (janvier 1970-janvier 2001) de l’indice composite composé de 70% MSCI World et 30% Micropal Obligations Internationales » ;
Considérant qu’alors que dans ce document, la société PRIMONIAL, vantait l’existence d’une « idée neuve », elle ne peut soutenir qu’un contrat d’assurance vie en unités de compte adossé à un contrat de prêt in fine, est une opération dont le mécanisme était connu de tous, qu’il ne suffisait pas aux clients, dont la profession d’agent de maîtrise pour Monsieur X… et de préparatrice en pharmacie pour Madame X… ne leur conférait pas de compétence spéciale en matière de placements financiers, d’avoir déjà souscrit une assurance vie et un prêt immobilier pour appréhender le mécanisme ainsi mis en place par le courtier, dans la mesure où il ne s’agissait pas de la simple juxtaposition de deux contrats mais d’un montage dont les risques étaient accrus par le fait qu’alors qu’il était présenté par la société PRIMONIAL dans la plaquette commerciale comme une opération particulièrement favorable, le placement fait sur le contrat d’assurance vie devait, pour ne pas être déficitaire, générer une plus-value au moins égale au montant des intérêts et des frais payés par le souscripteur ; Considérant qu’en l’espèce, le capital de 15 244,90 euros investis par Monsieur et Madame X… sur le contrat d’assurance vie de Monsieur X… devait, pour que l’opération soit neutre pour eux, générer une plus-value minimum sur 10 ans de 8994 euros ce qui représentait environ 60% du capital investi, que la société PRIMONIAL devait, par le biais des documents qu’elle rédigeait, informer ses clients de manière complète et explicite sur les risques accrus générés par le montage à effet de levier dont elle n’a présenté que les avantages et elle ne prouve pas qu’il a rempli cette obligation, alors que même s’il est indiqué dans la plaquette d’information que la bourse est soumise à certaines fluctuations, il est également précisé que « la Bourse offre le meilleur rendement pour un investissement à long terme « ce qui est confirmé par les informations contenues dans la seconde page du document qui sont de nature à présenter le montage comme étant sans risque pour le souscripteur ; Considérant de plus que le courtier ne peut soutenir que les effondrements successifs qui ont secoué les marchés boursiers ces dernières années n’étaient nullement prévisibles à court et moyen terme, que ce soit dans leur ampleur ou même leur existence alors que le placement a été réalisé en décembre 2001 et qu’il reconnaît lui-même dans ses écritures qu’après l’effervescence des marchés financiers dans les années 90, notamment après 1999, où le CAC 40 avait progressé de près de 51,12 %, la bulle spéculative a éclaté dans les années 2000 et 2001, puisque l’indice a reculé respectivement de 0,54% et de 21,97% ce dont il résulte qu’en tant que professionnel averti des risques dus aux fluctuations des placements boursiers et qui avait connaissance de l’évolution péjorative des marchés financiers, le courtier a manqué à son obligation d’ information en présentant le montage à effet de levier, qui supposait un rendement déjà important pour ne pas causer de perte au souscripteur, sans en souligner les risques ; [
] Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral. Considérant que les soucis et tracas générés par le caractère péjoratif du placement qui faisait perdre à Monsieur et Madame X… une partie de leur épargne sont constitutifs d’un préjudice moral qui sera justement réparé par l’allocation d’une somme globale de 3000 euros à titre de dommages et intérêts » ;
ALORS QU’en 2002, date de conclusion des contrats litigieux, le courtier grossiste n’était tenu que d’une obligation de délivrer à son partenaire, le courtier direct, des documents d’information faisant état des caractéristiques du produit et du risque éventuellement encouru ; qu’en l’espèce, le document remis au courtier direct, qui l’a transmis aux clients, mentionne expressément que la bourse est soumise à fluctuations et précise que le contrat garantit le capital, ce qui n’équivaut pas à une garantie comprenant les intérêts de l’emprunt ; qu’en ne recherchant pas si, en l’état des obligations du courtier grossiste à la date de formation du contrat, l’information délivrée n’était pas suffisante, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du code civil dans sa rédaction alors applicable.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt d’AVOIR débouté la société Primonial -courtier grossiste- de ses demandes -en garantie- à l’encontre de la société Magnacarta -courtier direct ;
AUX MOTIFS QUE : « soutenant que seule la société SAX PATRIMOINE CONSULTANT était tenue d’une devoir d’information et de mise en garde à l’égard des appelants et qu’elle n’a jamais été en contact direct avec ceux-ci, la société PRIMONIAL sollicite la condamnation de la société MAGNACARTA à la garantir de toute condamnation à son encontre ;
Considérant que la société MAGNACARTA rétorque que l’information que les appelants considèrent comme étant défaillante est celle contenue dans la plaquette qui a été conçue et réalisée uniquement par la société PRIMONIAL, qu’en sa qualité de concepteur du produit, celle-ci était tenue de lui fournir les documents nécessaires à l’information et le conseil des clients et qu’elle-même n’a remis à ceux-ci que les documents qui lui étaient transmis et qui avaient été élaborés par la société PRIMONIAL et a respecté les termes du contrat conclu avec celle-ci ; Considérant qu’alors que la cour retient la responsabilité de la société PRIMONIAL à raison des mentions contenues dans la plaquette d’information commerciale qu’elle remis à la société SAX PATRIMOINE CONSULTANT aux droits de laquelle se trouve la société MAGNACARTA et que celle-ci a remis aux souscripteurs conformément aux termes du protocole du 6 novembre 2001, la société PRIMONIAL doit être déboutée de sa demande de garantie à l’encontre de la société MAGNACARTA » ;
ALORS 1/ QUE la société Primonial faisait valoir que la société Magnacarta était tenue à garantie, en tant que débiteur d’une obligation d’information et de conseil à l’égard des clients en qualité de courtier direct de ceux-ci ; qu’en déboutant la société Primonial, motif pris de ce que la responsabilité de celle-ci était engagée du fait des mentions contenues dans la plaquette d’information, sans rechercher si, indépendamment de l’éventuel manquement de la société Primonial, la société Magnacarta n’avait pas elle-même manqué à ses obligations, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable en l’espèce ;
ALORS 2/ QUE le courtier direct, qui commercialise un produit, est débiteur d’une obligation d’information et de conseil à l’égard de ses clients ; qu’il doit notamment s’enquérir des objectifs de ceux-ci et leur proposer des placements adaptés et non se borner à délivrer les documents d’information établis par le courtier grossiste ; qu’en considérant néanmoins que la société Magnacarta, courtier direct, n’était pas tenue de garantir la société Primonial, courtier grossiste n’ayant aucun lien contractuel avec les clients, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil en sa rédaction alors applicable.
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ECLI:FR:CCASS:2019:C100033
Analyse
Décision attaquée : Cour d’appel de Paris , du 9 mai 2017
2. Cass. com., 13 févr. 2019, no 17-14785,
ECLI:FR:CCASS:2019:CO00199, Banque CIC Nord Ouest c/ Mme B., PB (cassation partielle CA Caen, 15 déc. 2016), Mme Mouillard, prés. ; Me Bouthors, Me Le Prado, av.
Références
Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du mercredi 13 février 2019
N° de pourvoi: 17-14785
Publié au bulletin Cassation partielle
Mme Mouillard, président
Me Le Prado, Me Bouthors, avocat(s)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l’arrêt suivant :COMM.FB COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 13 février 2019Cassation partielle
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 199 FS-P+B
Pourvoi n° X 17-14.785
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par la société Banque CIC Nord Ouest, société anonyme, dont le siège est […], contre l’arrêt rendu le 15 décembre 2016 par la cour d’appel de Caen (2e chambre civile et commerciale), dans le litige l’opposant à Mme D… B…, domiciliée […], défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 15 janvier 2019, où étaient présents : Mme Mouillard, président, M. Blanc, conseiller référendaire rapporteur, M. Guérin, Mme Vallansan, M. Remeniéras, Mmes Graff-Daudret, Vaissette, Bélaval, Fontaine, conseillers, Mme Schmidt, M. Guerlot, Mmes Barbot, Brahic-Lambrey, Kass-Danno, conseillers référendaires, Mme Henry, avocat général, Mme Labat, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Blanc, conseiller référendaire, les observations de Me Le Prado, avocat de la société Banque CIC Nord Ouest, de Me Bouthors, avocat de Mme B…, l’avis de Mme Henry, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le troisième moyen :
Vu l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016 ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que, le 6 mars 2008, la société Banque Scalbert-Dupont CIN, devenue CIC Nord Ouest (la banque), a consenti à Mme B… un prêt destiné à financer l’acquisition d’un bien immobilier destiné à la location, remboursable in fine le 15 avril 2020 et garanti par le nantissement d’un contrat d’assurance vie souscrit par son intermédiaire ; que, le 14 juin 2013, Mme B… a assigné la banque en responsabilité pour avoir manqué à son obligation de mise en garde lors de l’octroi de ce prêt ;
Attendu que pour condamner la banque à payer à Mme B… la somme de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts, l’arrêt retient, d’abord, que les performances du contrat d’assurance vie nanti, ainsi que des autres placements détenus par Mme B…, présentaient un caractère aléatoire et que si, à l’échéance du prêt le 15 avril 2020, Mme B… ne disposait pas des fonds nécessaires à son remboursement, elle s’exposerait à la vente de l’appartement financé sans avoir l’assurance qu’elle en retirerait un prix suffisant pour apurer sa dette ; qu’il retient, ensuite, que la banque ne prouve pas s’être assurée que Mme B…, emprunteuse profane, avait pris conscience du risque d’endettement excessif auquel l’exposait cette opération ; qu’il retient, enfin, que ce manquement a fait perdre à Mme B… une chance de ne pas contracter le prêt litigieux et que le préjudice subi doit être évalué à 40 % du montant total des intérêts, arrondi à la somme de 100 000 euros ;
Qu’en statuant ainsi, alors que le manquement d’une banque à son obligation de mettre en garde un emprunteur non averti sur le risque d’endettement excessif né de l’octroi d’un prêt prive cet emprunteur d’une chance d’éviter le risque qui s’est réalisé, la réalisation de ce risque supposant que l’emprunteur ne soit pas en mesure de faire face au paiement des sommes exigibles au titre du prêt, et qu’il résultait de ses constatations que le terme du prêt, remboursable in fine, n’était pas échu, de sorte que le risque, sur lequel la banque s’était abstenue de mettre Mme B… en garde, ne s’était pas réalisé, la cour d’appel, qui a indemnisé un préjudice éventuel, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il rejette la demande de Mme B… tendant à ce qu’il soit enjoint à la société CIC Nord Ouest de préciser les éléments pris en considération pour le calcul du taux effectif global et notamment de préciser si le coût du nantissement est inclus ou non, l’arrêt rendu le 15 décembre 2016, entre les parties, par la cour d’appel de Caen ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Rouen ;
Condamne Mme B… aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société CIC Nord Ouest la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize février deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Banque CIC Nord Ouest.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué
D’AVOIR condamné le CIC Nord Ouest à payer à Mme B… la somme de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts.
AUX MOTIFS QU’ «il est acquis que par acte sous seing privé en date du 6 mars 2008 la société CIC banque Scalbert-Dupont CIN a consenti à Mme D… B… un prêt in fine d’un montant de 110 680 € et un prêt relais d’un montant de 22 174 € pour financer l’acquisition en VEFA d’un appartement destiné à la location dans une résidence de tourisme située à Equemauville dans le Calvados moyennant le prix de 142554 € ; que le premier prêt d’un montant de 110 680 € est un prêt in fine, « à remboursement DIVERS » dont les conditions particulières précisent qu’il est remboursable en capital et intérêts le 15 avril 2020 et que son coût total s’élève, assurance comprise, à la somme de 102623,99 € dont 90362,74 € au titre des intérêts au taux contractuel de 5,10 % l’an ; que le second prêt d’un montant de 22174 € est un prêt relais « à remboursement DIVERS » dont les conditions particulières précisent qu’il est remboursable en capital et intérêts le 15 avril 2010, les intérêts s’élevant à la somme de 2318,61€ ; que ce dernier prêt a été remboursé à l’échéance par Mme B… et n’est pas visé par sa demande indemnitaire qui concerne exclusivement le prêt de 110680 € ; que le prêt de 110 680 € était garanti par une prise d’hypothèque sur l’immeuble acheté et le nantissement du contrat d’assurance vie Assur Horizon souscrit par l’appelante par l’intermédiaire du CIC moyennant le versement d’une prime initiale de 80 000 €, le terme de l’adhésion étant fixé au 31 décembre 2020 ; que bien qu’envisagé dans ce cadre par le cabinet Alliance labellisation aucune des pièces produites ne prouve que cette acquisition s’est effectivement inscrite dans une opération de défiscalisation ; qu’il ressort par contre du même document que cet investissement locatif visait à procurer un revenu à l’appelante qui n’a exercé aucun emploi jusqu’à son divorce le 16 décembre 2004 et alternait depuis cette date contrats de travail rémunérés au SMIC et périodes de chômage ; que Mme B… fait grief au CIC d’avoir manqué à son devoir de mise en garde à son égard lors de la souscription du prêt de 110 680€ ; que la banque n’est tenue d’un devoir de mise en garde qu’à l’égard de l’emprunteur non averti ; que si Mme B… est qualifiée d’agent immobilier dans le dossier patrimonial réalisé par le cabinet Alliance labélisation produit par l’appelante et s’est elle même présentée comme négociatrice immobilière dans un mail versé aux débats il ressort de son contrat de travail contemporain de la signature des prêts qu’elle était alors secrétaire commerciale dans une agence immobilière et qu’il s’agissait de son premier emploi après 20 ans d’inactivité professionnelle ; que le CIC ne s’est pas mépris sur l’emploi réel de Mme B… qualifiée d’employée administrative dans le certificat de garantie ASSUR- PRET à en tête de CICbanque BSD-CIN délivré le 13 décembre 2007 à l’intéressée pour attester des conditions de son admission au contrat d’assurances collectives souscrit par le groupe des banques CIC auprès de ACM Vie SA, et dans la demande d’adhésion de Mme B… au contrat collectif d’assurance sur la vie « Plan Azur horizons » souscrit par le CIC auprès du même assureur en date du 14 février 2008 ; que sa qualité d’employée administrative ne lui conférant aucune compétence particulière pour apprécier le contenu, la portée et les risques liés aux concours consentis Mme B… dont il n’est pas établi qu’elle aurait acquis cette expérience en dehors de son activité professionnelle, doit être considérée comme une emprunteuse profane ; que le devoir de mise en garde oblige le banquier, avant d’apporter son concours, à vérifier les capacités financières de son client et l’adéquation du prêt proposé à ses facultés contributives ; que si le dossier patrimonial déjà cité créditait Mme B… d’une épargne totale supérieure à 300 000 € aucune pièce ne prouve qu’elle détenait une telle somme ; que pour sa part le CIC produit un document émanant de la BPE (banque privée européenne) valorisant la totalité des placements détenus par Mme B… dans cette banque à la somme totale de 134 345,91 € au 10 octobre 2007 (pièce n°4 de l’intimé) incluant les fonds placés sur le contrat d’assurance vie Myrialis, objets de la pièce n°1 de l’intimée, et dans le FCPI Jet innovation 2, objet de sa pièce n°2, ainsi que les conditions particulières de la souscription par Mme B… à effet du 15 mars 2007 d’un contrat d’assurance vie Skandia Archipel moyennant l’investissement d’une somme nette de 4 800 €. ; qu’à la date de la souscription des prêts litigieux le 6 mars 2008 Mme B… détenait donc une épargne d’un montant justifié de 139 146 € inférieur de 3400 € à celui de l’opération immobilière valorisée 142 554 € ; que s’agissant d’un prêt in fine dont le terme n’était fixé qu’au 15 avril 2020 la banque devait intégrer l’aléa qui en résultait dans son appréciation des facultés contributives de Mme B… et vérifier qu’à cette date l’emprunteuse aurait les moyens de payer le capital de 110 680 € et les intérêts échus d’un montant de 90 362,74 € soit un total de 201 042,74 € ; que le caractère lui même aléatoire des performances du contrat d’assurance vie adossé au prêt, nanti par l’emprunteuse au profit de la banque et sur lequel Mme B… a versé la somme de 80 000 €, réduisant son épargne à 59 146 €, ainsi que des placements conservés par l’appelante à hauteur de cette dernière somme compte tenu de leur nature (PEA,FCPI, contrats d’assurance vie), renforçait l’aléa particulier de l’opération qui interdisait de tenir pour acquis le 6 mars 2008 que Mme B… disposerait des fonds nécessaires au paiement de la somme de 201 042,74 € le 15 avril 2020 ; que l’année 2020 étant celle de son soixante cinquième anniversaire correspond en outre à celle de son départ en retraite entraînant la réduction corrélative de revenus déjà modestes ; que si à cette date Mme B… ne dispose pas des fonds suffisants pour solder le prêt, elle s’expose à la vente de l’appartement dont elle a financé l’achat par l’emprunt alors qu’elle l’a acquis pour se procurer un revenu au travers de la perception des loyers, ce que la banque ne soutient pas avoir ignoré, loyers dont elle se trouverait alors privée sans avoir l’assurance que compte tenu de sa spécificité le bien constitué par un deux pièces meublé voué à la location dans une résidence de tourisme sur la côte normande trouvera preneur à un prix suffisant pour apurer la dette ; que le CIC qui a pris une part active à l’opération en proposant le prêt in fine sur 12 ans et en plaçant le contrat d’assurance vie adossé au prêt, devait s’assurer que Mme B… avait pris conscience des risques spécifiques à cette opération et notamment du fait que le remboursement du prêt était en partie lié à la rentabilité du placement sur un contrat d’assurance vie conclu par son intermédiaire et que toute insuffisance sur ce point l’exposait à un effort financier dont rien n’assurait le 6 mars 2008 qu’elle aurait les moyens d’y faire face, et donc à un risque d’endettement excessif ; que la banque ne prouve pas qu’elle s’est acquittée de cette obligation et ce manquement au devoir de mise en garde engage sa responsabilité envers Mme B… ; que le CIC ne peut s’exonérer de cette responsabilité en faisant valoir que l’appelante était assistée de ses propres conseils, le cabinet Alliance labélisation et de son notaire, le concours de ces derniers n’ayant pas pour effet de le dispenser de sa propre obligation envers l’emprunteuse ; que le manquement imputable à la banque a fait perdre à Mme B… une chance de ne pas contracter le prêt litigieux et le préjudice subi doit être évalué à l’aune de cette perte de chance qu’il convient de fixer en l’espèce à 40% du montant total des intérêts arrondis à la somme de 100 000 € ; que la SA banque CIC nord ouest doit donc être condamnée à payer à Mme B… la somme de 40 000 € à titre de dommages et intérêts, le jugement déféré étant infirmé ; que les conditions posées par ce texte étant réunies les intérêts au taux légal produits par cette somme à compter du présent arrêt seront capitalisés conformément aux dispositions de l’article 1154 ancien devenu l’article 1343-2 nouveau du code civil».
ALORS, D’UNE PART, QU’ qu’une banque n’est pas tenue d’un devoir de mise en garde à l’égard de l’emprunteur , fût-il non averti, sur les risques de l’opération qu’elle propose, consistant à lui accorder un prêt remboursable in fine, garanti par le nantissement d’un contrat d’assurance-vie qu’il a souscrit en vue de financer, avec un apport partiel, l’acquisition d’un immeuble destiné à la location, les opérations en cause ne présentant aucun caractère spéculatif ; que pour imputer une faute au CIC Nord Ouest, l’arrêt retient que celui-ci n’a pas mis en garde Mme B… des risques spécifiques attachés à l’opération, consistant à accorder un prêt in fine auquel est adossé un contrat d’assurance-vie, du fait que le remboursement du prêt était en partie lié à la rentabilité du placement effectué sur ce dernier ; qu’en statuant par ces motifs d’où il résulte que les opérations ne présentaient aucun caractère spéculatif, de sorte que la banque n’était tenue d’aucun devoir de mise en garde envers sa cliente, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.
ALORS, D’AUTRE PART, QUE dans ses conclusions signifiées le 4 mai 2016 (p 16 § 5 à 8), le CIC Nord Ouest soutenait que Mme B… avait été parfaitement informée et éclairée sur la nature des placements proposés, comme en attestait le formulaire d’adhésion qu’elle avait signé, stipulant, concernant l’option «niveau de risque limité » – choisie par sa cliente – que « la valeur des parts qui reflète la valeur d’actifs sous-jacents n’est pas garantie mais est sujette à des fluctuations à la hausse où à la baisse dépendant en particulier des marchés financiers » ; qu’en ne répondant pas à ces écritures déterminantes établissant que Mme B… avait été éclairée sur les caractéristiques les moins favorables et sur les risques inhérents aux options qui peuvent être le corollaire des avantages annoncés, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué
D’AVOIR condamné le CIC Nord Ouest à payer à Mme B… la somme de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts.
AUX MOTIFS QU’ «il est acquis que par acte sous seing privé en date du 6 mars 2008 la société CIC banque Scalbert-Dupont CIN a consenti à Mme D… B… un prêt in fine d’un montant de 110 680 € et un prêt relais d’un montant de 22 174 € pour financer l’acquisition en VEFA d’un appartement destiné à la location dans une résidence de tourisme située à Equemauville dans le Calvados moyennant le prix de 142554 € ; que le premier prêt d’un montant de 110 680 € est un prêt in fine, « à remboursement DIVERS » dont les conditions particulières précisent qu’il est remboursable en capital et intérêts le 15 avril 2020 et que son coût total s’élève, assurance comprise, à la somme de 102623,99 € dont 90362,74 € au titre des intérêts au taux contractuel de 5,10 % l’an ; que le second prêt d’un montant de 22174 € est un prêt relais « à remboursement DIVERS » dont les conditions particulières précisent qu’il est remboursable en capital et intérêts le 15 avril 2010, les intérêts s’élevant à la somme de 2318,61€ ; que ce dernier prêt a été remboursé à l’échéance par Mme B… et n’est pas visé par sa demande indemnitaire qui concerne exclusivement le prêt de 110680 € ; que le prêt de 110 680 € était garanti par une prise d’hypothèque sur l’immeuble acheté et le nantissement du contrat d’assurance vie Assur Horizon souscrit par l’appelante par l’intermédiaire du CIC moyennant le versement d’une prime initiale de 80 000 €, le terme de l’adhésion étant fixé au 31 décembre 2020 ; que bien qu’envisagé dans ce cadre par le cabinet Alliance labellisation aucune des pièces produites ne prouve que cette acquisition s’est effectivement inscrite dans une opération de défiscalisation ; qu’il ressort par contre du même document que cet investissement locatif visait à procurer un revenu à l’appelante qui n’a exercé aucun emploi jusqu’à son divorce le 16 décembre 2004 et alternait depuis cette date contrats de travail rémunérés au SMIC et périodes de chômage ; que Mme B… fait grief au CIC d’avoir manqué à son devoir de mise en garde à son égard lors de la souscription du prêt de 110 680€ ; que la banque n’est tenue d’un devoir de mise en garde qu’à l’égard de l’emprunteur non averti ; que si Mme B… est qualifiée d’agent immobilier dans le dossier patrimonial réalisé par le cabinet Alliance labélisation produit par l’appelante et s’est elle même présentée comme négociatrice immobilière dans un mail versé aux débats il ressort de son contrat de travail contemporain de la signature des prêts qu’elle était alors secrétaire commerciale dans une agence immobilière et qu’il s’agissait de son premier emploi après 20 ans d’inactivité professionnelle ; que le CIC ne s’est pas mépris sur l’emploi réel de Mme B… qualifiée d’employée administrative dans le certificat de garantie ASSUR- PRET à en tête de CICbanque BSD-CIN délivré le 13 décembre 2007 à l’intéressée pour attester des conditions de son admission au contrat d’assurances collectives souscrit par le groupe des banques CIC auprès de ACM Vie SA, et dans la demande d’adhésion de Mme B… au contrat collectif d’assurance sur la vie « Plan Azur horizons » souscrit par le CIC auprès du même assureur en date du 14 février 2008 ; que sa qualité d’employée administrative ne lui conférant aucune compétence particulière pour apprécier le contenu, la portée et les risques liés aux concours consentis Mme B… dont il n’est pas établi qu’elle aurait acquis cette expérience en dehors de son activité professionnelle, doit être considérée comme une emprunteuse profane ; que le devoir de mise en garde oblige le banquier, avant d’apporter son concours, à vérifier les capacités financières de son client et l’adéquation du prêt proposé à ses facultés contributives ; que si le dossier patrimonial déjà cité créditait Mme B… d’une épargne totale supérieure à 300 000 € aucune pièce ne prouve qu’elle détenait une telle somme ; que pour sa part le CIC produit un document émanant de la BPE (banque privée européenne) valorisant la totalité des placements détenus par Mme B… dans cette banque à la somme totale de 134 345,91 € au 10 octobre 2007 (pièce n°4 de l’intimé) incluant les fonds placés sur le contrat d’assurance vie Myrialis, objets de la pièce n°1 de l’intimée, et dans le FCPI Jet innovation 2, objet de sa pièce n°2, ainsi que les conditions particulières de la souscription par Mme B… à effet du 15 mars 2007 d’un contrat d’assurance vie Skandia Archipel moyennant l’investissement d’une somme nette de 4 800 €. ; qu’à la date de la souscription des prêts litigieux le 6 mars 2008 Mme B… détenait donc une épargne d’un montant justifié de 139 146 € inférieur de 3400 € à celui de l’opération immobilière valorisée 142 554 € ; que s’agissant d’un prêt in fine dont le terme n’était fixé qu’au 15 avril 2020 la banque devait intégrer l’aléa qui en résultait dans son appréciation des facultés contributives de Mme B… et vérifier qu’à cette date l’emprunteuse aurait les moyens de payer le capital de 110 680 € et les intérêts échus d’un montant de 90 362,74 € soit un total de 201 042,74 € ; que le caractère lui même aléatoire des performances du contrat d’assurance vie adossé au prêt, nanti par l’emprunteuse au profit de la banque et sur lequel Mme B… a versé la somme de 80 000 €, réduisant son épargne à 59 146 €, ainsi que des placements conservés par l’appelante à hauteur de cette dernière somme compte tenu de leur nature (PEA,FCPI, contrats d’assurance vie), renforçait l’aléa particulier de l’opération qui interdisait de tenir pour acquis le 6 mars 2008 que Mme B… disposerait des fonds nécessaires au paiement de la somme de 201 042,74 € le 15 avril 2020 ; que l’année 2020 étant celle de son soixante cinquième anniversaire correspond en outre à celle de son départ en retraite entraînant la réduction corrélative de revenus déjà modestes ; que si à cette date Mme B… ne dispose pas des fonds suffisants pour solder le prêt, elle s’expose à la vente de l’appartement dont elle a financé l’achat par l’emprunt alors qu’elle l’a acquis pour se procurer un revenu au travers de la perception des loyers, ce que la banque ne soutient pas avoir ignoré, loyers dont elle se trouverait alors privée sans avoir l’assurance que compte tenu de sa spécificité le bien constitué par un deux pièces meublé voué à la location dans une résidence de tourisme sur la côte normande trouvera preneur à un prix suffisant pour apurer la dette ; que le CIC qui a pris une part active à l’opération en proposant le prêt in fine sur 12 ans et en plaçant le contrat d’assurance vie adossé au prêt, devait s’assurer que Mme B… avait pris conscience des risques spécifiques à cette opération et notamment du fait que le remboursement du prêt était en partie lié à la rentabilité du placement sur un contrat d’assurance vie conclu par son intermédiaire et que toute insuffisance sur ce point l’exposait à un effort financier dont rien n’assurait le 6 mars 2008 qu’elle aurait les moyens d’y faire face, et donc à un risque d’endettement excessif ; que la banque ne prouve pas qu’elle s’est acquittée de cette obligation et ce manquement au devoir de mise en garde engage sa responsabilité envers Mme B… ; que le CIC ne peut s’exonérer de cette responsabilité en faisant valoir que l’appelante était assistée de ses propres conseils, le cabinet Alliance labélisation et de son notaire, le concours de ces derniers n’ayant pas pour effet de le dispenser de sa propre obligation envers l’emprunteuse ; que le manquement imputable à la banque a fait perdre à Mme B… une chance de ne pas contracter le prêt litigieux et le préjudice subi doit être évalué à l’aune de cette perte de chance qu’il convient de fixer en l’espèce à 40% du montant total des intérêts arrondis à la somme de 100 000 € ; que la SA banque CIC nord ouest doit donc être condamnée à payer à Mme B… la somme de 40 000 € à titre de dommages et intérêts, le jugement déféré étant infirmé ; que les conditions posées par ce texte étant réunies les intérêts au taux légal produits par cette somme à compter du présent arrêt seront capitalisés conformément aux dispositions de l’article 1154 ancien devenu l’article 1343-2 nouveau du code civil».
ALORS, D’UNE PART, QUE le devoir de mise en garde du banquier n’existe qu’en cas de risque d’endettement excessif de l’emprunteur, ce risque s’appréciant au regard de la situation financière déclarée par celui-ci dont le prêteur n’a pas à vérifier l’exactitude ; que pour imputer à la banque un manquement à son devoir de mise en garde, l’arrêt retient que « si le dossier patrimonial réalisé par le cabinet Alliance remis par l’emprunteuse au CIC Nord Ouest créditait celle-ci d’une épargne totale supérieure à 300 000 euros, aucune pièce ne prouve qu’elle détenait une telle somme » et relève qu’ « à la date de la souscription de l’emprunt litigieux, Mme B… détenait une épargne d’un montant justifié du 139 euros » ; qu’en appréciant l’existence d’un risque à l’aune des biens et revenus « effectifs » de l’emprunteuse et non des biens et revenus « déclarés » par celle-ci, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil.
ALORS, D’AUTRE PART, QUE dans ses conclusions signifiées le 4 mai 2016 (p 8 § 8) le CIC Nord Ouest faisait valoir qu’ « il n’avait jamais été convenu que l’échéance finale du contrat d’assurance-vie garantirait le paiement de celle du contrat de prêt » ; qu’en affirmant péremptoirement que la banque aurait dû vérifier qu’ « au 15 avril 2020 Mme B… aurait les moyens de payer le capital de 110 680 euros et les intérêts échus d’un montant de 90 362,74 euros, soit un total de 201 042,74 euros », sans constater l’existence d’un engagement en ce sens souscrit par le CIC Nord Ouest, la cour d’appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil, dans leur rédaction applicable en la cause.
ALORS ENFIN QUE le banquier qui n’a pas à s’immiscer dans les affaires de son client, n’a pas à se substituer à l’emprunteur dans l’appréciation de l’opportunité ou de la rentabilité de l’opération financée ; que pour imputer au CIC Nord Ouest un manquement à un prétendu devoir de mis en garde l’arrêt retient que « si le 15 avril Mme B… ne dispose pas des fonds suffisants pour solder le prêt, elle s’expose à la vente de l’appartement financé par l’emprunt sans avoir l’assurance que compte tenu de sa spécificité(sic), le bien constitué par un deux pièces meublé voué à la location dans une résidence de tourisme trouvera preneur à un prix suffisant pour apurer la dette » ; qu’en se déterminant par ces motifs tirés de la configuration du bien financé, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)
Il est fait grief à l’arrêt attaqué
D’AVOIR condamné le CIC Nord Ouest à payer à Mme B… la somme de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts.
AUX MOTIFS QU’ «il est acquis que par acte sous seing privé en date du 6 mars 2008 la société CIC banque Scalbert-Dupont CIN a consenti à Mme D… B… un prêt in fine d’un montant de 110 680 € et un prêt relais d’un montant de 22 174 € pour financer l’acquisition en VEFA d’un appartement destiné à la location dans une résidence de tourisme située à Equemauville dans le Calvados moyennant le prix de 142554 € ; que le premier prêt d’un montant de 110 680 € est un prêt in fine, « à remboursement DIVERS » dont les conditions particulières précisent qu’il est remboursable en capital et intérêts le 15 avril 2020 et que son coût total s’élève, assurance comprise, à la somme de 102623,99 € dont 90362,74 € au titre des intérêts au taux contractuel de 5,10 % l’an ; que le second prêt d’un montant de 22174 € est un prêt relais « à remboursement DIVERS » dont les conditions particulières précisent qu’il est remboursable en capital et intérêts le 15 avril 2010, les intérêts s’élevant à la somme de 2318,61€ ; que ce dernier prêt a été remboursé à l’échéance par Mme B… et n’est pas visé par sa demande indemnitaire qui concerne exclusivement le prêt de 110680 € ; que le prêt de 110 680 € était garanti par une prise d’hypothèque sur l’immeuble acheté et le nantissement du contrat d’assurance vie Assur Horizon souscrit par l’appelante par l’intermédiaire du CIC moyennant le versement d’une prime initiale de 80 000 €, le terme de l’adhésion étant fixé au 31 décembre 2020 ; que bien qu’envisagé dans ce cadre par le cabinet Alliance labellisation aucune des pièces produites ne prouve que cette acquisition s’est effectivement inscrite dans une opération de défiscalisation ; qu’il ressort par contre du même document que cet investissement locatif visait à procurer un revenu à l’appelante qui n’a exercé aucun emploi jusqu’à son divorce le 16 décembre 2004 et alternait depuis cette date contrats de travail rémunérés au SMIC et périodes de chômage ; que Mme B… fait grief au CIC d’avoir manqué à son devoir de mise en garde à son égard lors de la souscription du prêt de 110 680€ ; que la banque n’est tenue d’un devoir de mise en garde qu’à l’égard de l’emprunteur non averti ; que si Mme B… est qualifiée d’agent immobilier dans le dossier patrimonial réalisé par le cabinet Alliance labélisation produit par l’appelante et s’est elle même présentée comme négociatrice immobilière dans un mail versé aux débats il ressort de son contrat de travail contemporain de la signature des prêts qu’elle était alors secrétaire commerciale dans une agence immobilière et qu’il s’agissait de son premier emploi après 20 ans d’inactivité professionnelle ; que le CIC ne s’est pas mépris sur l’emploi réel de Mme B… qualifiée d’employée administrative dans le certificat de garantie ASSUR- PRET à en tête de CICbanque BSD-CIN délivré le 13 décembre 2007 à l’intéressée pour attester des conditions de son admission au contrat d’assurances collectives souscrit par le groupe des banques CIC auprès de ACM Vie SA, et dans la demande d’adhésion de Mme B… au contrat collectif d’assurance sur la vie « Plan Azur horizons » souscrit par le CIC auprès du même assureur en date du 14 février 2008 ; que sa qualité d’employée administrative ne lui conférant aucune compétence particulière pour apprécier le contenu, la portée et les risques liés aux concours consentis Mme B… dont il n’est pas établi qu’elle aurait acquis cette expérience en dehors de son activité professionnelle, doit être considérée comme une emprunteuse profane ; que le devoir de mise en garde oblige le banquier, avant d’apporter son concours, à vérifier les capacités financières de son client et l’adéquation du prêt proposé à ses facultés contributives ; que si le dossier patrimonial déjà cité créditait Mme B… d’une épargne totale supérieure à 300 000 € aucune pièce ne prouve qu’elle détenait une telle somme ; que pour sa part le CIC produit un document émanant de la BPE (banque privée européenne) valorisant la totalité des placements détenus par Mme B… dans cette banque à la somme totale de 134 345,91 € au 10 octobre 2007 (pièce n°4 de l’intimé) incluant les fonds placés sur le contrat d’assurance vie Myrialis, objets de la pièce n°1 de l’intimée, et dans le FCPI Jet innovation 2, objet de sa pièce n°2, ainsi que les conditions particulières de la souscription par Mme B… à effet du 15 mars 2007 d’un contrat d’assurance vie Skandia Archipel moyennant l’investissement d’une somme nette de 4 800 €. ; qu’à la date de la souscription des prêts litigieux le 6 mars 2008 Mme B… détenait donc une épargne d’un montant justifié de 139 146 € inférieur de 3400 € à celui de l’opération immobilière valorisée 142 554 € ; que s’agissant d’un prêt in fine dont le terme n’était fixé qu’au 15 avril 2020 la banque devait intégrer l’aléa qui en résultait dans son appréciation des facultés contributives de Mme B… et vérifier qu’à cette date l’emprunteuse aurait les moyens de payer le capital de 110 680 € et les intérêts échus d’un montant de 90 362,74 € soit un total de 201 042,74 € ; que le caractère lui même aléatoire des performances du contrat d’assurance vie adossé au prêt, nanti par l’emprunteuse au profit de la banque et sur lequel Mme B… a versé la somme de 80 000 €, réduisant son épargne à 59 146 €, ainsi que des placements conservés par l’appelante à hauteur de cette dernière somme compte tenu de leur nature (PEA,FCPI, contrats d’assurance vie), renforçait l’aléa particulier de l’opération qui interdisait de tenir pour acquis le 6 mars 2008 que Mme B… disposerait des fonds nécessaires au paiement de la somme de 201 042,74 € le 15 avril 2020 ; que l’année 2020 étant celle de son soixante cinquième anniversaire correspond en outre à celle de son départ en retraite entraînant la réduction corrélative de revenus déjà modestes ; que si à cette date Mme B… ne dispose pas des fonds suffisants pour solder le prêt, elle s’expose à la vente de l’appartement dont elle a financé l’achat par l’emprunt alors qu’elle l’a acquis pour se procurer un revenu au travers de la perception des loyers, ce que la banque ne soutient pas avoir ignoré, loyers dont elle se trouverait alors privée sans avoir l’assurance que compte tenu de sa spécificité le bien constitué par un deux pièces meublé voué à la location dans une résidence de tourisme sur la côte normande trouvera preneur à un prix suffisant pour apurer la dette ; que le CIC qui a pris une part active à l’opération en proposant le prêt in fine sur 12 ans et en plaçant le contrat d’assurance vie adossé au prêt, devait s’assurer que Mme B… avait pris conscience des risques spécifiques à cette opération et notamment du fait que le remboursement du prêt était en partie lié à la rentabilité du placement sur un contrat d’assurance vie conclu par son intermédiaire et que toute insuffisance sur ce point l’exposait à un effort financier dont rien n’assurait le 6 mars 2008 qu’elle aurait les moyens d’y faire face, et donc à un risque d’endettement excessif ; que la banque ne prouve pas qu’elle s’est acquittée de cette obligation et ce manquement au devoir de mise en garde engage sa responsabilité envers Mme B… ; que le CIC ne peut s’exonérer de cette responsabilité en faisant valoir que l’appelante était assistée de ses propres conseils, le cabinet Alliance labélisation et de son notaire, le concours de ces derniers n’ayant pas pour effet de le dispenser de sa propre obligation envers l’emprunteuse ; que le manquement imputable à la banque a fait perdre à Mme B… une chance de ne pas contracter le prêt litigieux et le préjudice subi doit être évalué à l’aune de cette perte de chance qu’il convient de fixer en l’espèce à 40% du montant total des intérêts arrondis à la somme de 100 000 € ; que la SA banque CIC nord ouest doit donc être condamnée à payer à Mme B… la somme de 40 000 € à titre de dommages et intérêts, le jugement déféré étant infirmé ; que les conditions posées par ce texte étant réunies les intérêts au taux légal produits par cette somme à compter du présent arrêt seront capitalisés conformément aux dispositions de l’article 1154 ancien devenu l’article 1343-2 nouveau du code civil».
ALORS QU’un risque, fût-il certain, ne suffit pas à caractériser la perte certaine d’une chance et le préjudice en résultant est purement éventuel ; que le souscripteur d’un contrat d’assurance-vie qui a versé sur ce contrat une somme destinée à rembourser en partie in fine le capital emprunté avec les revenus du placement ne justifie d’aucun préjudice consécutif à l’opération en cause tant que le capital d’assurance-vie n’a pas été racheté et que les pertes alléguées ne se sont pas effectivement réalisées ; qu’en condamnant le CIC Nord Ouest à indemniser la perte de chance prétendument subie par Mme B… de ne pas contracter le prêt in fine adossé au contrat d’assurance-vie, motif pris que l’aléa de l’opération interdit de tenir pour acquis que la rentabilité du placement permettra à l’emprunteuse de disposer des fonds nécessaires au remboursement du prêt le 15 avril 2020, la cour d’appel a indemnisé un préjudice éventuel en violation de l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016.
ECLI:FR:CCASS:2019:CO00199
Analyse
Publication :
Décision attaquée : Cour d’appel de Caen , du 15 décembre 2016
Titrages et résumés :
-
- BANQUE – Responsabilité – Faute – Manquement à l’obligation de mise en garde – Préjudice – Perte d’une chance – Réalisation du risque – Impossibilité de faire face au paiement des sommes exigibles au titre du prêt
-
- Le manquement d’une banque à son obligation de mettre en garde un emprunteur non averti sur le risque d’endettement excessif né de l’octroi d’un prêt prive cet emprunteur d’une chance d’éviter le risque qui s’est réalisé, la réalisation de ce risque supposant que l’emprunteur ne soit pas en mesure de faire face au paiement des sommes exigibles au titre du prêt
-
- PRET – Prêt d’argent – Prêteur – Etablissement de crédit – Responsabilité – Manquement au devoir de mise en garde – Préjudice – Perte d’une chance d’éviter le risque qui s’est réalisé – Condition nécessaire – Impossibilité pour l’emprunteur de faire face au paiement des sommes exigibles au titre du prêt
Textes appliqués :
-
- article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016
3. Cass. com., 6 mars 2019, no 17-22668,
ECLI:FR:CCASS:2019:CO00241, SCI Eloes et M. V. c/ Société Générale, D (cassation partielle CA Aix-en-Provence, 11 mai 2017), Mme Mouillard, prés ; SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, av.
Références
Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du mercredi 6 mars 2019
N° de pourvoi: 17-22668
Publié au bulletin Cassation partielle
Mme Mouillard, président
SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat(s)
Texte intégral
AU NOM DU PEUPLE FRANCAISCOUR DE CASSATION
Audience publique du 6 mars 2019
Cassation partielle
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 241 FS-P+B
Pourvoi n° R 17-22.668
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
1°/ M. Y… V…, domicilié […],
2°/ la société Eloes, société civile immobilière, dont le siège est […], contre l’arrêt rendu le 11 mai 2017 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (8e chambre B), dans le litige les opposant :
1°/ à la société Crédit logement, dont le siège est […],
2°/ à la Société générale, dont le siège est […], défenderesses à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 29 janvier 2019, où étaient présents : Mme Mouillard, président, M. Blanc, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, M. Guérin, Mme Vallansan, M. Remeniéras, Mmes Graff-Daudret, Vaissette, Bélaval, Fontaine, conseillers, Mme Schmidt, M. Guerlot, Mmes Barbot, Brahic-Lambrey, Kass-Danno, Lion, conseillers référendaires, M. Graveline, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Blanc, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de M. V… et de la SCI Eloes, de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la Société générale, de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Crédit logement, l’avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que, le 7 mai 1999, la Société générale (la banque) a consenti à la SCI Eloes (la SCI) un prêt remboursable in fine à l’issue d’une période de douze ans ; que le remboursement de ce prêt était garanti par le nantissement de deux contrats d’assurance-vie, souscrits par M. V… par l’intermédiaire de la banque, et par le cautionnement de celui-ci et de la société Crédit logement ; que la banque, faisant valoir que le rachat total des contrats d’assurance-vie le 9 mars 2012 n’avait permis qu’un remboursement partiel du prêt, a, le 31 mai 2012, mis en demeure la SCI et les cautions de lui payer les sommes restant dues ; qu’après avoir désintéressé la banque, la société Crédit logement a assigné la SCI en paiement ; que M. V… et la SCI ont assigné la banque en responsabilité le 18 mars 2013, en lui reprochant de n’avoir pas informé M. V…, lors de la souscription des contrats d’assurance-vie, du risque que le rachat de ces contrats ne permette pas de rembourser le prêt à son terme ; que les instances ont été jointes ;
Sur le moyen unique, en ce qu’il fait grief à l’arrêt de condamner la SCI à payer une certaine somme à la société Crédit logement et de dire que M. V… sera tenu au paiement d’une partie de cette condamnation :
Attendu que les motifs critiqués n’étant pas le soutien de ces chefs du dispositif, le moyen est inopérant ;
Mais sur le moyen, pris en sa première branche, en ce qu’il fait grief à l’arrêt de dire prescrite l’action en responsabilité engagée par la SCI et M. V… contre la Société générale :
Vu l’article L. 110-4 du code de commerce ;
Attendu que pour déclarer prescrite l’action en responsabilité engagée par M. V… et la SCI contre la banque, l’arrêt, après avoir énoncé que le dommage résultant du manquement du banquier à ses obligations de conseil et de mise en garde à l’occasion du montage mis en place pour financer une acquisition immobilière et associant souscription d’un prêt in fine et adhésion à des contrats d’assurance-vie consiste en la perte d’une chance de ne pas contracter, laquelle se manifeste dès l’octroi du prêt, retient que la prescription a donc commencé à courir à la date de conclusion du contrat de prêt, en l’occurrence le 7 mai 1999 ;
Qu’en statuant ainsi, alors que le dommage invoqué par M. V…, souscripteur des contrats d’assurance-vie nantis, consistait en la perte de la chance d’éviter la réalisation du risque que, du fait d’une contre-performance de ces contrats, leur rachat ne permette pas de rembourser le prêt, et que ce risque n’avait pu se réaliser qu’au terme de celui-ci, en 2011, de sorte que ce dommage, comme celui, par ricochet, invoqué par la SCI, n’avaient pu survenir qu’à cette date et que l’action exercée le 18 mars 2013 n’était donc pas prescrite, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il déclare prescrite l’action en responsabilité contractuelle engagée par la SCI Eloes et M. V… contre la Société générale et en ce qu’il condamne la SCI Eloes et M. V… à payer à la Société générale la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, l’arrêt rendu le 11 mai 2017, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Montpellier ;
Met hors de cause, sur sa demande, la société Crédit logement dont la présence devant la cour de renvoi n’est plus nécessaire à la solution du litige ;
Condamne la Société générale aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. V… et à la SCI Eloes la somme globale de 3 000 euros et condamne M. V… et la SCI Eloes à payer à la société Crédit logement la somme globale de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six mars deux mille dix-neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour M. V… et la SCI Eloes
LE POURVOI REPROCHE A L’ARRÊT ATTAQUÉ D’AVOIR confirmé le jugement ayant condamné la société civile immobilière ELOES à payer à la société CREDIT LOGEMENT la somme de 152.876,77 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 16 août 2012 jusqu’à parfait paiement et capitalisation des intérêts et déclaré prescrite l’action en responsabilité contractuelle engagée par la SCI ELOES et Monsieur V… à l’encontre de la SA SOCIETE GENERALE et dit que M. Y… V…, en sa qualité de caution personnelle, sera tenu au paiement des condamnations mises à la charge de la SCI ELOES, à concurrence d’un tiers de leur montant ;
AUX MOTIFS QUE les appelants font grief au jugement déféré d’avoir déclaré prescrite l’action par eux engagée à l’encontre de la SA Société Générale ; qu’ils exposent qu’en ce qui concerne la SCI Eloes, qui n’était pas partie aux contrats d’assurance-vie, la faute commise par la banque consistant en un manquement à son devoir de conseil et de mise en garde envers M. Y… V… n’a pu lui apparaître qu’au terme du prêt in fine, soit en juin 2011, que le tribunal ne pouvait déclarer prescrite l’action en réparation d’un préjudice né en juin 2011 dès lors qu’elle a été introduite en mars 2013 ; que s’agissant des demandes de M. Y… V…, ils font valoir que celui-ci n’a été avisé que le 25 mars 2011 de ce que l’assurance-vie qu’il avait souscrite en vue de procéder au remboursement de l’échéance du prêt in fine qui devait intervenir en juin 2011 ne permettrait pas d’y procéder, que le point de départ de la prescription de l’action devait donc être fixé au 25 mars 2011 de sorte qu’il avait jusqu’au 25 mars 2016 pour formaliser sa contestation, qu’ainsi son action n’était nullement prescrite le 18 mars 2013 ; que, si la prescription d’une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu’elle n’en avait pas eu précédemment connaissance, l’action engagée à l’encontre de la SA Société Générale par les appelants concerne, au vu de leurs conclusions, le devoir de mise en garde et de conseil qui incombe au banquier à l’occasion du montage mis en place pour le financement de l’opération d’acquisition immobilière réalisée par la société Eloes, associant souscription d’un prêt in fine et adhésion à des contrats d’assurance-vie ; qu’ainsi, M. Y… V… et la SCI Eloes reprochent à l’établissement de crédit d’avoir manqué à son obligation de mise en garde ; que le dommage résultant d’un tel manquement consiste en une perte de chance de ne pas contracter, laquelle se manifeste dès l’octroi du prêt ; qu’il en est de même s’agissant du devoir de conseil qui s’apprécie à l’occasion de l’opération de banque, et dont le défaut se traduit par une perte de chance de ne pas souscrire le contrat ; qu’en conséquence, le point de départ de la prescription se situe à la date de conclusion de la convention de prêt, en l’occurrence le 7 mai 1999 ; que dès lors, étant constaté qu’il n’est pas contesté que la prescription applicable est celle, décennale désormais quinquennale, de l’article L. 110-4 du code de commerce, l’action en responsabilité engagée par la SCI Eloes et M. Y… V… à l’encontre de la SA Société Générale par acte du 18 mars 2013 est prescrite ; que le jugement est confirmé de ce chef ;
ALORS D’UNE PART QUE la prescription de l’action en responsabilité du banquier court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu’elle n’en a pas eu précédemment connaissance ; qu’ayant rappelé, que, si la prescription d’une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu’elle n’en avait pas eu précédemment connaissance, puis relevé que l’action engagée à l’encontre de la SA Société Générale par les appelants concerne, au vu de leurs conclusions, le devoir de mise en garde et de conseil qui incombe au banquier à l’occasion du montage mis en place pour le financement de l’opération d’acquisition immobilière réalisée par la société Eloes, associant souscription d’un prêt in fine et adhésion à des contrats d’assurance-vie, qu’ainsi, M. Y… V… et la SCI Eloes reprochent à l’établissement de crédit d’avoir manqué à son obligation de mise en garde, que le dommage résultant d’un tel manquement consiste en une perte de chance de ne pas contracter, laquelle se manifeste dès l’octroi du prêt, qu’il en est de même s’agissant du devoir de conseil qui s’apprécie à l’occasion de l’opération de banque, et dont le défaut se traduit par une perte de chance de ne pas souscrire le contrat pour en déduire que le point de départ de la prescription se situe à la date de conclusion de la convention de prêt, en l’occurrence le 7 mai 1999, que dès lors, étant constaté qu’il n’est pas contesté que la prescription applicable est celle, décennale désormais quinquennale, de l’article L. 110-4 du code de commerce, l’action en responsabilité engagée par la SCI Eloes et M. Y… V… à l’encontre de la SA Société Générale par acte du 18 mars 2013 est prescrite quand le dommage était apparu à l’échéance du contrat de prêt in fine, date à laquelle la valeur des contrats d’assurance-vie aurait dû permettre à la débitrice de rembourser l’intégralité du contrat de prêt souscrit, et non à la date de signature du contrat de prêt, la cour d’appel a violé l’article L. 110-4 du code de commerce ;
ALORS D’AUTRE PART QUE la prescription de l’action en responsabilité du banquier court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu’elle n’en a pas eu précédemment connaissance ; que M. V… faisait valoir qu’en 2003, lorsqu’est révélé le rendement pour 2002, l’investisseur profane pouvait encore croire, eu égard aux résultats positifs de 2003, qu’un rendement supérieur à 20 % comme lors de la conclusion du contrat pouvait de nouveau être atteint pour réaliser les objectifs fixés en vue du remboursement de l’échéance finale du prêt, qu’en outre, la nullité du rendement en 2000 et sa faible régression en 2001 (-7%) ne permettaient pas de prendre conscience, pour un souscripteur profane, de la réalisation du dommage, dont il aura connaissance en 2011 par l’information qui lui sera communiquée par la banque sur les résultats catastrophiques des assurances-vie dont le rendement devait permettre de rembourser le prêt tant en capital qu’intérêts ; qu’en retenant que l’action engagée à l’encontre de la banque par les appelants concerne le devoir de mise en garde et de conseil qui incombe au banquier à l’occasion du montage mis en place pour le financement de l’opération d’acquisition immobilière réalisée par la société Eloes, associant souscription d’un prêt in fine et adhésion à des contrats d’assurance-vie, qu’ainsi, M. Y… V… et la SCI Eloes reprochent à l’établissement de crédit d’avoir manqué à son obligation de mise en garde, que le dommage résultant d’un tel manquement consiste en une perte de chance de ne pas contracter, laquelle se manifeste dès l’octroi du prêt, qu’il en est de même s’agissant du devoir de conseil qui s’apprécie à l’occasion de l’opération de banque, et dont le défaut se traduit par une perte de chance de ne pas souscrire le contrat, pour en déduire que le point de départ de la prescription se situe à la date de conclusion de la convention de prêt, en l’occurrence le 7 mai 1999, que dès lors l’action en responsabilité engagée par la SCI Eloes et M. Y… V… à l’encontre de la SA Société Générale par acte du 18 mars 2013 est prescrite, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l’exposant n’avait pas eu connaissance du dommage en 2011 par l’information qui lui sera communiquée par la banque sur le rendement des assurances-vie, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 110-4 du code de commerce ;
ALORS ENFIN QUE la prescription de l’action en responsabilité du banquier court à compter de la réalisation du dommage ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu’elle n’en a pas eu précédemment connaissance ; que la caution faisait valoir qu’en 2003, lorsqu’est révélé le rendement pour 2002, l’investisseur profane pouvait encore croire, eu égard aux résultats positifs de 2003 qu’un rendement supérieur à 20 % comme lors de la conclusion du contrat pouvait de nouveau être atteint pour réaliser les objectifs fixés en vue du remboursement de l’échéance finale du prêt, qu’en outre, la nullité du rendement en 2000 et sa faible régression en 2001 (-7%) ne permettaient pas de prendre conscience, pour un souscripteur profane, de la réalisation du dommage, dont il aura connaissance par l’information qui lui sera communiquée par la banque en 2011 sur les résultats catastrophiques des assurances-vie dont le rendement devait permettre de rembourser le prêt tant en capital qu’intérêts ; qu’en retenant que l’action engagée à l’encontre de la banque par les appelants concerne le devoir de mise en garde et de conseil qui incombe au banquier à l’occasion du montage mis en place pour le financement de l’opération d’acquisition immobilière réalisée par la société Eloes, associant souscription d’un prêt in fine et adhésion à des contrats d’assurance-vie, qu’ainsi, M. Y… V… et la SCI Eloes reprochent à l’établissement de crédit d’avoir manqué à son obligation de mise en garde, que le dommage résultant d’un tel manquement consiste en une perte de chance de ne pas contracter, laquelle se manifeste dès l’octroi du prêt, qu’il en est de même s’agissant du devoir de conseil qui s’apprécie à l’occasion de l’opération de banque, et dont le défaut se traduit par une perte de chance de ne pas souscrire le contrat pour en déduire que le point de départ de la prescription se situe à la date de conclusion de la convention de prêt, en l’occurrence le 7 mai 1999, que dès lors l’action en responsabilité engagée par la SCI Eloes et M. Y… V… à l’encontre de la SA Société Générale par acte du 18 mars 2013 est prescrite, la cour d’appel qui se prononce par des motifs inopérants au regard de l’opération complexe proposée par la banque, a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 110-4 du code de commerce ;
ECLI:FR:CCASS:2019:CO00241
Analyse
Décision attaquée : Cour d’appel d’Aix-en-Provence , du 11 mai 2017
Titrages et résumés :
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- PRESCRIPTION CIVILE – Délai – Point de départ – Applications diverses – Nantissement d’un contrat d’assurance-vie en garantie du remboursement d’un prêt in fine – Manquement à l’obligation d’informaion du client – Risque de ne pas pouvoir rembourser le prêt à son terme par le rachat en raison d’une contre-performance du contrat – Préjudice – Perte d’une chance d’éviter la réalisation de ce risque – Survenance du dommage – Terme du prêt
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- Lorsque le souscripteur d’un contrat d’assurance-vie, nanti en garantie du remboursement d’un prêt in fine, reproche à la banque prêteuse, par l’intermédiaire de laquelle ce contrat a été souscrit, de ne pas l’avoir informé du risque que, du fait d’une contre-performance de ce contrat, son rachat ne permette pas de rembourser le prêt à son terme, le dommage qu’il invoque consiste en la perte de la chance d’éviter la réalisation de ce risque. Ce risque ne pouvant se réaliser qu’au terme du prêt, le dommage ainsi invoqué ne peut lui-même survenir qu’à cette date, laquelle constitue en conséquence le point de départ de l’action en responsabilité exercée contre la banque par le souscripteur
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- BANQUE – Responsabilité – Faute – Manquement à l’obligation d’information du client – Applications diverses – Contre-performance du contrat – Contrat d’assurance-vie nanti en garantie du remboursement d’un prêt in fine – Action du souscripteur contre la banque – Délai de prescription – Point de départ – Terme du prêt – Réalisation du risque
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- ASSURANCE DE PERSONNES – Assurance-vie – Nantissement en garantie du remboursement d’un prêt in fine – Action du souscripteur contre la banque – Prescription – Délai – Point de départ
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- PRET – Prêt d’argent – Prêteur – Etablissement de crédit – Responsabilité – Manquement à l’obligation d’information – Applications diverses – Nantissement d’un contrat d’assurance-vie en garantie du remboursement d’un prêt in fine – Action du souscripteur contre la banque – Prescription – Délai – Point de départ
Textes appliqués :
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- article L. 110-4 du code de commerce