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Gazette du Palais, n°216 du 4 août 2015 – Droit Bancaire

Le temps, invisible, exige l’illustration avec quelque chose de perceptible. Le rapport annuel 2014 de la Cour de Cassation (1) a consacré son étude au temps. Il nous invite à la réflexion sur les rapports entretenus entre le temps et le droit.

De manière plus pragmatique, ce rapport éclaire la construction du droit et l’évolution de son rapport au temps, notamment dans le domaine des relations avec les banques.

Le temps est souvent éclairé par le visage des changements et leurs effets, par exemple celui des cycles économiques sur le rôle du banquier de Dominique Legeais (2) a livré récemment sa vision de l’évolution de la responsabilité bancaire pour fourniture de crédit, de l’excès à la pénurie, d’une lutte contre le risque de surendettement à la lutte pour une dynamique de consommation responsable de Crédits.

L’étude de la Cour de Cassation relève la fonction protectrice de la modulation des délais, notamment les délais d’équité en droit du surendettement.

Le temps de la coopération est aujourd’hui venu.

Le contrat, instrument de crédit, dans le sens de la confiance, glisse d’une lutte d’intérêts individuels vers la promotion de l’intérêt commun, la prise en compte réciproque des intérêts de l’autre.

Le droit doit davantage utiliser le temps pour construire la relation de confiance par le dialogue de bonne foi et favoriser ainsi le développement d’une culture de la coopération.

Sont progressivement découverts par le juge ou instaurés par le législateur des devoirs issus de règles de bonne conduite professionnelle.

Réciproquement au développement de ces obligations, pèse sur le cocontractant l’obligation de bonne foi dans les informations fournies, comme en témoignent les décisions sanctionnant le comportement malicieux, la réticence ou la fausse déclaration.

Au-delà du temps de réflexion injecté dans le processus contractuel, c’est le temps du dialogue,  de la connaissance de l’autre et de la formation professionnelle qui permet d’appréhender les aspects subjectifs nécessaires à l’appréciation de la capacité d’adaptation au temps.

Le rapport de la Cour de Cassation analyse la modulation des délais au service de la négociation au cours du procès, notamment l’adaptation de la prescription par la mise en œuvre du temps nécessaire à l’émergence d’une solution négociée.

Surtout, ce rapport souligne l’adaptation du contrat au temps long.

La jurisprudence de la Cour est donc nette : « en cas de déséquilibre dû à une modification imprévue des circonstances économiques, les parties doivent de bonne foi renégocier les modalités du contrat en vue de rétablir l’équilibre rompu ».

Si la perpétuité des engagements est prohibée, l’obligation de coopération a fait émerger une obligation de motivation de la rupture, comme l’aménagement de délais de préavis raisonnables.

Enfin, il y a lieu de souligner le choix de la Cour de Cassation d’insérer dans son rapport annuel la décision de sa chambre commerciale 7 janvier 2014, laquelle, « en faisant prévaloir (…) le principe de la transmission universelle du patrimoine de la société absorbante, a voulu conférer une plus grande sécurité juridique aux opérations de cautionnement bancaire dans un contexte de restructuration permanente du secteur bancaire et financier », pour permettre l’adaptation au mouvement perpétuel.

« Le droit doit davantage utiliser le temps pour construire la relation de confiance par le dialogue de bonne foi et favoriser ainsi le développement d’une culture de coopération »            

 

Bénédicte Bury

(*) Références

  1. Rapport annuel 2014 de la Cour de cassation
  2. Dominique Legeais Professeur à l’Université Paris Descartes

La Gazette du Palais n°216 du 4 août 2015 – Sommaire :

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